samedi 19 mai 2012

Deuxième étage

Je me suis assis par terre, près de la fenêtre. En quelque sorte pas très loin des voisins non plus. La lumière était douce, rose dans le presque soir. J’ai pensé à Hopper et je me suis dit que ça ferait une jolie photo (à défaut de tableau), moi ou un autre, un type assis là, les jambes repliées sur ses pensées. J’ai ressenti un grand vide à regarder les affreuses dalles de lino collées autrefois à la va-vite et qu’il va falloir recouvrir d’autre chose. J’ai regardé les murs. État d’usage. « Vous rigolez ou quoi ? ».
Un grand vide à ne pas savoir si je devais me réjouir ou être consterné. Consterné. C’est plus petit, c’est plus cher (le déclassement est vraiment une spécialité familiale) et l’empressement du vieux à louer cela sans même un coup de pinceau est un peu désespérant : on peut me raconter toutes les sinistres mésaventures des propriétaires avec des locataires indélicats, je ne parviens pas à les plaindre. On ne force aucun propriétaire à spéculer sur le prix du logement.
Nostalgie. Du passé et de l’avenir – on ne se refait pas. Malgré tous ses défauts (il attirait l’eau mieux qu’une éponge – celle du dehors, celle des voisins – et il a tout de même gelé à l’intérieur cet hiver), l’appartement de la rue Saint-Marc va me manquer. Quoi qu’il pût s’y jouer, d’heureux comme de tragique, il s’agit d’un lieu que je ne reverrai sans doute jamais, et la mémoire souffre toujours un peu de ce qu’elle est contrainte d’abandonner dans les lieux quittés. Rêverai-je autant de cet appartement que j’ai pu le faire de celui de Montrouge ? Enfin, ce n’est pas si simple pour moi de revenir dans cet arrondissement que j’ai tant fréquenté autrefois avec des amis aujourd’hui dispersés. Ou dispersés.
Et puis tout de même, quelque chose m’a amusé, dont j’ai parlé autrefois : j’habite encore en lisière, cette fois-ci du 11e et du 20e, et tout près du Père-Lachaise qui est à sa façon l’un des plus beaux parcs de Paris. En déambulant dans le quartier au hasard, j’ai repéré quelques cafés où je sais aller bientôt vagabonder en attendant que * s’éveille lorsqu’il aura dormi là…