dimanche 14 juin 2009

Des rues tièdes

Paris dans l'incandescence des néons. Les voitures qui roulent vers les fêtes. D'autres costumes. La fatigue, l'ennui, la tristesse partout derrière les rires follets et les sourires de feu. Une femme s'amuse ; on dirait qu'elle pleure. La fatigue tombe sur moi comme un voile. Et l'ennui. Et la solitude parmi les autres. Un vieux monsieur en costume passe, ses talons raclent le sol. Sa femme s'agace, range seule, en faisant beaucoup de bruit, la vaisselle. Il a dit qu'il sortait faire un tour. Elle aussi aimerait bien, mais il y a toute cette vaisselle à ranger dans les cris de la télévision.

Ruban dans les cheveux, souffle tiède sur le visage, le vieux monsieur s'est retourné sur la jeune fille à vélo. Il a fini de passer et a tourné à l'angle de la rue.

Les vies anonymes passent sans devoir s'arrêter. Dans le sillon de leurs marches, l'innocence et la joie. Assis près de moi le fantôme de l'envie : les hommes sont très sincèrement beaux. L'ombrage du regard noir, le ventre saillant sous le polo, la démarche vaine.

Méfiance dans les parfums de jasmin. La solitude et la fatigue. Je rentre.

1 commentaire:

  1. C'est un très beau texte, Christophe. j'aime beaucoup cette description du bruit du silence, du mouvement de l'immobilité, du trop plein du vide, du désir de tout et de rien... Tous ces paradoxes de la vie et de la ville...
    J'aime beaucoup cette description, que je trouve simplement touchante et belle. Chaque mot semble choisi pour venir percuter de plein fouet la solitude, dont la simple évocation devient elle-même frappante.
    Merci pour ce moment!

    Écrit par : Andesmas | 14 juin 2009
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    Je suis un peu jaloux du commentaire de Samuel, car après deux trois relectures j'avais à l'esprit une sensation que je n'arrivais pas à formuler. Bref, je voyais le film qui s'évaporait des mots.

    Écrit par : Kab-Aod | 14 juin 2009
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    "la vaisselle à ranger dans les cris de la télévision" : plutôt que de touiller mon vague à l'âme, je préfère m'esclaffer sur cette formule magnifquement bien trouvée. Tu me permets ?
    Le reste aussi, est très beau, bien sûr. Mais je te l'ai déjà tellement dit, sur d'autres notes....

    Écrit par : Lancelot | 16 juin 2009
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    Chaque fois que je viens lire ici, ça m'énerve. Je lis, je relis, je reviens le lendemain, je lis encore, je me dis "Mets un commentaire, dis-lui comme tu aimes ce qu'il écrit, comme il l'écrit." Et puis je trouve bête de le dire, de l'écrire, et pourtant je voudrais que tu le saches. Mais tes mots n'ont besoin souvent de rien d'autre que de silence. Enfin voilà, c'est (mal) dit.
    "Et la solitude parmi les autres": nous sommes quelques-uns à tourner autour de ce thème-là pour le moment.

    Écrit par : calystee | 16 juin 2009
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    > Tous : Merci. Je ne sais pas bien déballer les cadeaux. Je ne sais pas davantage recevoir les compliments. Je crois surtout que vous avez tous suffisamment éprouvé ces moments-là pour...

    Écrit par : christophe | 16 juin 2009

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