Le vieux somnolait, son visage offert au soleil. Le chapeau roulait dans le fond de la barque au gré des vagues et du vent qui sifflait quand passaient un peu bas les avions de guerre. C'était alors assourdissant, mais ils laissaient le vieux sans peur. On entendait au loin, à l'intérieur des terres, le chuintement des bombes qui froissaient l'air avant de s'abattre avec un bruit terrible qui couvrait les sirènes.
Le vieux gratta sa peau qui, depuis des semaines, se détachait en longs rubans translucides. Il y avait quelque chose dans l'air.
Il se leva péniblement, les jambes un peu engourdies, et alla à l'autre bout de la barque, tira sa ligne et vérifia si le morceau de journal qu'il avait mâchouillé était toujours accroché à l'hameçon. Ça allait. Il la remit à l'eau et jeta un coup d'œil circulaire. Çà et là des poissons transparents exhibaient leur ventre au ciel bleu ; le vieux se demandait ce qui lui arriverait s'il en mangeait un...
On disait que ça vous faisait crever à petit feu, que vous entrailles noircissaient en une nuit, que vos cheveux restaient sur l'oreiller et vous restiez là, sur votre grabat, à vous tordre de douleurs pendant des jours et des jours qui n'en finissaient plus.
Mais, tout de même...
Le vieux prit un bâton au fond de la barque et se pencha au dessus de l'eau. Il appuya la pointe sur le ventre d'un de ces poissons, qui s'enfonça en laissant échapper un bruit amusant de baudruche percée qui illumina d'un sourire le visage du vieux.
Mouais...
Il regarda le soleil dans le ciel et jugea qu'il était temps de rentrer. Il n'avait rien pris, aujourd'hui comme hier, et encore les jours d'avant. Mais il y avait encore un peu d'essence dans le moteur.
Sur le chemin du retour, il vit flotter un corps.
Il lâcha un soupir qui ne venait pas de très loin, de quelque part dans le haut de sa gorge, là où sa salive séchait en écume noire.
Le vieux gratta sa peau qui, depuis des semaines, se détachait en longs rubans translucides. Il y avait quelque chose dans l'air.
Il se leva péniblement, les jambes un peu engourdies, et alla à l'autre bout de la barque, tira sa ligne et vérifia si le morceau de journal qu'il avait mâchouillé était toujours accroché à l'hameçon. Ça allait. Il la remit à l'eau et jeta un coup d'œil circulaire. Çà et là des poissons transparents exhibaient leur ventre au ciel bleu ; le vieux se demandait ce qui lui arriverait s'il en mangeait un...
On disait que ça vous faisait crever à petit feu, que vous entrailles noircissaient en une nuit, que vos cheveux restaient sur l'oreiller et vous restiez là, sur votre grabat, à vous tordre de douleurs pendant des jours et des jours qui n'en finissaient plus.
Mais, tout de même...
Le vieux prit un bâton au fond de la barque et se pencha au dessus de l'eau. Il appuya la pointe sur le ventre d'un de ces poissons, qui s'enfonça en laissant échapper un bruit amusant de baudruche percée qui illumina d'un sourire le visage du vieux.
Mouais...
Il regarda le soleil dans le ciel et jugea qu'il était temps de rentrer. Il n'avait rien pris, aujourd'hui comme hier, et encore les jours d'avant. Mais il y avait encore un peu d'essence dans le moteur.
Sur le chemin du retour, il vit flotter un corps.
Il lâcha un soupir qui ne venait pas de très loin, de quelque part dans le haut de sa gorge, là où sa salive séchait en écume noire.