dimanche 19 avril 2009

Des hommes du parc




Le soleil, à l'horizon, s'enfonçait lentement dans l'océan. Au-delà du regard, la ligne d'un bleu sombre, entre le ciel et la mer, se brouillait, entrait en ébullition peut-être, devenait lentement orange. Dans d'ultimes reflets de rouge, les petites allées s'enfonçaient à flanc de falaise, entre les branches d'une végétation complice. On voyait, çà et là, les petites pointes des cigarettes, et l'on devinait déjà, comme tombées avec la nuit, les odeurs mêlées du tabac et du désir. Et ce fut enfin l'heure noire du cliquetis des boucles de ceintures, les boutons défaits à la hâte. L'heure noire, la belle heure, des marches hâtives - les regards en biais et les moues boudeuses. Un regard fut lancé, avec un souvenir de sauvagerie, soigneusement évité : le garçon timide avançait, les yeux sur le sol, dans le déni de ce qu'il venait chercher. Bientôt il arriva dans un cul-de-sac ; le chemin venait mourir là, sous un arbuste fleuri qui avait patiemment grignoté l'audace des pas répétés (autrefois ils descendaient un peu plus bas, au plus près de la mer, là où les roches se détachent avec fracas). Il s'assit sur un banc et, à son tour, alluma une cigarette.
Au loin, les pas un peu lourds, les respirations fatiguées des plus vieux. Son regard allait de ses pieds au bout incandescent de sa cigarette, tenue entre son pouce et son index - la posture était rodée - et, de temps à autre, entre les branches des arbustes, il affinait sa nonchalance, il adoucissait son regard, il esquissait un sourire, lancé à la mer, aux divinités des chemins, de la nuit et du désir. Les pas se rapprochèrent. Il affaissa ses bras entre ses jambes écartées et écrasa la cigarette sur la terre, traça avec le mégot un dessin obscène sur le sol. Lorsqu'il releva la tête, un homme lui faisait face, qui osait le sourire éclatant.

1 commentaire:

  1. Un des seuls avantages au fait de fumer (le seul selon moi) : ça aide à se donner une contenance dans ces "lieux-là".

    Dis donc, la musique en fond sonore évoque plus la communion solennelle que les ébats moites... Mais après tout. Il s'agit bien d'une forme de cérémonie, en effet...

    Écrit par : Lancelot | 22 avril 2009

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