samedi 24 mars 2012

La mémoire de l'eau

Il aura suffi d’un rêve. Un rêve assez cruel pour vous retenir dans le sommeil alors même que tout le corps gémit, à votre secours, pour vous en arracher. Puis dans le demi-sommeil encore, votre corps cherche à se blottir, ou à se cacher, ce n’est pas bien sûr. Le rêve, terrifiant, revenu de l'advenu, avec une autre voix, un autre visage.
Vous ne dépasserez jamais tout à fait la brisure du si que l’on vous a opposé, la pièce sordide de couleurs tendres, les teintes roses à vomir, la porte fermée à double tour sur la nuit qui riait encore de l’alcool, et le lit au fond qui restera toujours comme une paillasse. 
Il y avait une Minnie en peluche sur la table de nuit. Et un réveil ancien.
Pourtant, avoir fait de cela comme du reste, un événement des plus anodins qui doit céder sous le rire, et que vous auriez pu raconter à mille personnes autrefois, feignant d’en partager la légèreté alors que vous en semiez le poids.
Ce souvenir ou le premier de ces rêves, c’est selon, comme une frontière : l’ambigüité, le jeu qui tombe dans le sordide et qui manifeste devant toi, sur toi, ce que tu comprends avoir craint de toujours. Avant même les mots.
Une partie de toi a pu se cacher et te regarder céder.
Alors, plus que d’autres, tu éprouves dans le tremblement le trouble de la prédation, et quand le regard de l’autre parfois s’envoile, ça te glace, cet universel de la violence en lisière.

3 commentaires:

  1. C'est beau. La mémoire de l'eau.

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  2. > Georges et Calyste : Merci, vous deux. Plus beau que du Bachelard ? :-) Plus vraisemblable que du Benvéniste (Jacques, pas Emile) ?

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