mardi 6 mai 2008

Je me souviens II (école primaire)

Je me souviens de mes premières vacances en Ardèche durant lesquelles j’ai appris à nager.

Je me souviens d’avoir joué au docteur avec ma cousine plus jeune.

Je me souviens d’avoir été officiellement le fiancé de Suzy, Évelyne, Sandrine et Marine.

Je me souviens d’un garçon plus âgé qui a essayé de m’embrasser.

Je me souviens avec bonheur de toutes mes institutrices.

Je me souviens d’avoir fait perdre ma classe à un jeu ayant pour thème l’astronomie en répondant Sirius à la place de Soleil.

Je me souviens d’avoir pris beaucoup de plaisir à faire une petite tapisserie pour la fête des mères.

Je me souviens d’avoir pensé « qu’il est beau » en regardant mon copain Olivier jouer au foot.

Je me souviens du film Hitcher et de la peur que j’ai eue.

Je me souviens des courses de vitesse que je faisais à béquilles, avec ma jambe dans le plâtre.

Je me souviens être resté coincé six heures dans un train à l’arrêt avec ma grand-mère.

Je me souviens d’une petite tempête qui a fait s’écrouler sur moi en pleine nuit la tente où je dormais.

Je me souviens ne plus vouloir aller chercher de l’eau à la cave à cause du film Amityville dont ma sœur m’avait fait le résumé.

Je me souviens du poster de Snoopy que je ne cessais de copier.

Je me souviens de mon copain Bertrand en larmes parce que sa mère s’acharnait à lui faire apprendre une leçon sur la préhistoire.

Je me souviens du fou-rire de la si gentille directrice qui, lors d’une interrogation orale sur le corps humain et alors qu’elle m’aidait à dire le mot « tendons » (« tend… ? tend… ? »), s’entendit répondre : « tendeur ».

Je me souviens de la remarque indignée d’Évelyne, une camarade, alors que j’exhibais fièrement mon Pif Gadget : « Tu lis des journaux communistes ! »

Je me souviens de la réponse de la même Évelyne, décidément très réactionnaire, à mon innocente question de savoir pourquoi certains catholiques n’aimaient pas les Juifs : « Parce qu’ils ont tué le Christ ! »

Je me souviens d’avoir cessé de croire en Dieu.

Je me souviens de la mort de mon oncle Gino.

Je me souviens de l’annonce de la mort d’Isabelle et de ma réponse aussi paniquée qu’inadaptée : « Et alors ? »

Je me souviens de l’escalier qu’on m’a fait monter alors que ma jambe cassée n’était pas plâtrée.

Je me souviens d’avoir gagné un petit et humiliant nécessaire de couture à un cross où je n’avais guère brillé.

Je me souviens d’une très gênante visite médicale scolaire durant laquelle j’ai pris ma mère en grippe.

Je me souviens des parties de billes avec mon père dans le salon.

Je me souviens que deux camarades de classe sont tombés dans le bassin – après avoir tout fait pour – à un goûter d’anniversaire, et de la crise d’hystérie d’une des mères.

Je me souviens m’être battu avec Alexis.

Je me souviens d’avoir écrit « le soleil est notre propre espoir de vie » sous une peinture (!) faite en classe.

Je me souviens des boulettes de papier toilette que nous lancions au plafond après les avoir trempées dans l’eau – et de nos fous-rires dans l’attente fébrile de leurs chutes. 

Je me souviens d’un voyage scolaire à Lyon.

Je me souviens d’une pièce de théâtre où je tenais deux rôles : le fermier et le cochon.

Je me souviens d'avoir voulu être une fille.

Je me souviens d’être passé d’une maigreur maladive qui paniquait ma grand-mère à un début d’obésité.

Je me souviens d’avoir parlé du néant avec Stéphane.

Je me souviens des enquêtes policières que nous menions au bord de la rivière, Bertrand, Alexis et moi.

Je me souviens des terribles histoires de noyades que l’on me racontait.

Je me souviens d’une institutrice que nous appelions Skeletor et qui semblait avoir cent ans.

Je me souviens d’une chanson très « catho de gauche » qu’on nous faisait chanter (« Oui, nous referons un monde, pleins de fleurs et de colombes, un immense champ de blés, où il fera bon s’aimer. »).

Je me souviens d’avoir fait tomber le magnétophone du petit ami de ma sœur et d’avoir éprouvé une immense angoisse tout le temps qu’a duré sa réparation.

Je me souviens d’avoir joué à l’instituteur avec ma voisine qui avait eu une fracture du crâne et avait un peu perdu la mémoire.

Je me souviens de lui avoir inventé un médicament à base de lait et de cannelle.

Je me souviens de m’être réfugié chez elle lorsque la chienne de ma grand-mère, Puce, est morte d’un arrêt cardiaque.

Je me souviens de la petite chienne que ma sœur avait trouvée à Paris, Uxie, et de la réflexion de ma mère en la voyant pour la première fois : « Oh, on dirait un rat ».

Commentaires
Ce que j'aime, dans ces deux notes, c'est comment des bribes de sens peuvent créer du sens. J'aime imaginer les liens qui se tissent et se détissent entre chaque "je me souviens", et comment le vide de l'entre-deux peut laisser une place à nos propres souvenirs. Car finalement, ce que tu racontes là nous renvoie aussi à notre propre enfance... Alors merci! 
Écrit par : Andesmas | 11 mai 2008
 
Tu sais, c'est un petit "exercice" très agréable à faire...
Écrit par : christophe | 14 mai 2008

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